Xavier Rousset, audioprothésiste indépendant Sonance Audition au Lavandou et mécène Audition Solidarité, a déjà participé à deux missions d’appareillage auditif solidaire à Paris et en République-Dominicaine. Il nous fait part de son engagement.
Vous êtes mécène auprès d’Audition Solidarité. De quand date votre engagement et en quoi consiste-t-il ?
J’ai rencontré Audition Solidarité quand j’étais encore salarié, et je les ai rejoints comme mécène dès que je me suis mis à mon compte au sein du groupement Sonance Audition, il y a 10 ans. Concrètement, l’engagement consiste à reverser 10 € par appareil vendu à Audition Solidarité, et à assurer la récupération des appareils que les patients ne portent plus, à l’occasion d’un renouvellement ou d’un décès par exemple. Nous les retournons à Audition Solidarité, qui possède son propre atelier de recyclage, et qui réemploie ces appareils pour équiper des populations défavorisées en France et à l’étranger.
Vous êtes-vous porté volontaire pour ces missions d’appareillage ?
Bien sûr. Mapremière mission a eu lieu à Paris, en 2016. Cela se déroulait à l’Hôtel-Dieu. Audition Solidarité y reçoit toutes les personnes qui sont en dehors du circuit classique, c’est à dire qui n’ont pas de carte Vitale : des réfugiés, des sans-abri, un public très modeste, plutôt adulte, avec très peu d’enfants. Bien souvent, il s’agit de personnes qui ne parlent pas bien le français, ou pas du tout. En plus, les personnes sourdes qu’on rencontre dans le cadre d’Audition solidarité souffrent souvent de surdité profonde et ne sont pas forcément oralisées.
C’est une expérience vraiment puissante. Les gens qui viennent ont souvent le sentiment qu’on leur sauve la vie, ou en tout cas, qu’on la leur change. Leurs réactions, quand on leur met les appareils sur les oreilles, sont bouleversantes.
Être en mission, c’est aussi faire l’expérience d’une autre pratique. On y travaille dans des conditions tout autres que celles de nos beaux labos, un peu « à l’arrache », mais dans une grande solidarité entre collègues. On doit faire confiance au professionnalisme de personnes qu’on n’a jamais rencontré, et deux heures après le début de la mission, on a l’impression de se connaître depuis toujours. C’est une bonne préparation à une mission à l’étranger…
Justement vous avez aussi participé à une mission à l’étranger. Comment s’est-elle déroulée ? Quelles sont les points communs, les différences avec la mission en France ?
J’ai eu la chance de partir en novembre 2021 en République dominicaine. La politique d’Audition Solidarité y est un peu différente : on y travaille avec des enfants, conjointement avec une association dominicaine qui fait le lien avec un réseau d’écoles spécialisées. Lors de ces missions, nous assurons l’appareillage de nouveaux enfants et nous procédons au suivi des appareillages effectués précédemment.
Le troisième axe, très important, c’est la formation de l’équipe locale sur tous les plans. Sur le plan médical, un médecin ORL membre de la mission a formé une étudiante en médecine aux pathologies de l’oreille et à effectuer de petits actes comme d’enlever les bouchons de cérumen. Il y a également une formation audiométrique pour mesurer l’audition avant de la corriger. Nous avons aussi formé des gens à la prise d’empreintes, pour la fabrication d’embouts spécifiques à chaque bénéficiaire : les enfants sont tous différents, et leurs oreilles grandissent… Et nous avons aussi assuré une formation au réglage des appareils. Enfin, très important : l’orthophonie. Trois orthophonistes françaises faisaient partie de l’équipe, pour former des orthophonistes dominicaines à la poursuite de la rééducation des enfants.
Cet axe formation est très gratifiant, parce qu’il permet un vrai échange pendant cinq ou six jours entre l’équipe dominicaine et l’équipe française. Le but est vraiment de rendre les professionnels locaux autonomes et de leur donner tous les moyens pour suivre les gamins dans les meilleures conditions.
Que retiendrez-vous de cette mission ?
Une mission comme celle-là, c’est une vraie remise en question. Au début, on se demande franchement ce qu’on fait là : l’ambiance franchement rock’n’roll, le grand open space complètement ouvert sur l’extérieur, le brouillard, du matériel peu familier, et ces gamins en face de soi… Et petit à petit, grâce à l’échange entre collègues et, surtout, avec les enfants et l’équipe dominicaine, on se sent parfaitement à sa place. Et utile : pensez qu’en une semaine, on a appareillé 300 enfants, c’est énorme !
Et puis il y a le souvenir de ce gamin qui n’avait jamais entendu — certains enfants sont très jeunes, quatre ou cinq ans… Je garde gravée dans ma mémoire l’image de son regard qui s’illumine d’un coup quand vous allumez les appareils pour la première fois sur ses oreilles, avec le papa et la maman à côté.
Partagez-vous cette expérience avec vos patients ?
Oui bien sûr, ça les intéresse. Il y a le côté aventure, qui alimente bien les conversations lors des visites. Mais ils apprécient aussi l’aspect éco-responsable et l’engagement solidaire au service de la santé auditive. C’est complètement cohérent avec la démarche de Sonance Audition : la place accordée à l’écoute et à la relation humaine, la rigueur du protocole d’appareillage, l’importance de la qualité du suivi à long terme…